Pour ce rendez-vous du mois de novembre, la rédaction a interrogé Benjamin Carlier, directeur du Tremplin à Paris, un incubateur dédié aux startups dans le sport.
- Bonjour Benjamin, pouvez-vous vous présenter ?
Après un cursus à Science Po Aix j’ai fait un master spécialisé management des organisations sportives à Marseille. Très vite je suis parti en agence de conseil en communication et marketing sportif chez Carat Sport où j’étais chargée d’étude, chef de projet et responsable de clientèle sur divers projets. Le plus important d’entre eux fut le partenariat avec La Poste et les arbitres de football, basket, rugby et handball.
Au bout de 3 ans j’ai démissionné et j’ai retrouvé quelques mois plus tard du travail en tant que collaborateur parlementaire de Valérie Fourneyron à l’Assemblée nationale ce qui me permettait de lier mes 2 passions : sport et politique. Valérie Fourneyron était déjà très impliquée dans le domaine du sport à l’Assemblée nationale où elle présidait un groupe de travail de l’assemblée du sport créé par Chantal Jouanno. Elle était également responsable de la campagne de François Hollande sur la thématique du sport. Au bout d’un an, Valérie Fourneyron est devenue Ministre des sports. Je suis donc devenu son chef adjoint de cabinet et conseillé sur un certain nombre de questions notamment sur la question du dopage ou les relations avec le mouvement sportif et le comité olympique. J’ai fait ça jusqu’à début avril 2014 avec le remaniement ministériel où j’ai quitté le cabinet.
Je voulais rester dans le sport et j’ai trouvé peu après du travail au sein de Paris&Co qui est l’agence de l’innovation de l’attractivité de Paris qui avait pour ambition, en lien avec la mairie de Paris de créer un incubateur de startups dédié au sport. Dans un premier temps j’ai été recruté pour faire une mission de construction de la stratégie pour monter cette plateforme d’innovation et tous les voyants étant au vert, j’ai continué à travailler avec Paris&Co et je continue à travailler pour eux en tant que directeur du Tremplin.
- Comment est venue l’opportunité du Tremplin ?
La volonté de création du Tremplin est clairement politique. Elle a été évoquée la 1ère fois par Bertrand Delanoë mais c’est surtout Anne Hidalgo qui l’a indiqué dans son programme de campagne en 2014 et c’est aujourd’hui affiché dans la lettre de mission de Jean-François Martins qui est l’adjoint au sport.
C’est une volonté de la ville de Paris de favoriser l’économie du sport, l’émergence de startups et de créer un lieu fort lié à l’économie du sport.
Aujourd’hui, l’économie du sport est un endroit où il y a des emplois et de la richesse à créer, la mairie de Paris à décider de travailler dans ce sens avec la création du Tremplin et la volonté de mettre tous les acteurs au sein d’une même plateforme que ce soit des partenaires institutionnels, des partenaires privés, des startups et de créer un écosystème du sport et de l’innovation. Nous étions convaincu qu’il y avait une place à prendre dans le domaine du sport car il y a des champs d’innovation divers et variés, c’est un secteur économique porteur et aussi car, l’organisation, telle quelle existe de la filière du sport laisse la place pour un acteur de l’innovation et du sport qui aille essayer de fédérer tous les acteurs du sport autour de cette thématique.
- Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste l’incubateur ?
L’objectif de l’incubateur pour les startups est de les mettre dans l’environnement le plus favorable possible pour le développement de leur activité. Nous allons leur proposer plusieurs choses :
- Un endroit pour travailler où elles sont toutes ensemble ce qui permet de favoriser naturellement les synergies entre elles
- Un accompagnement individuel par des gens qui connaissent le sport et on va essayer de suivre les startups pour suivre leur développement
- La mise en place d’un accompagnement collectif c’est-à-dire la mise en place de formations et de conférences sur la thématique du sport et de l’innovation qui sont censés aider les startups dans leur développement
Après il y a des choses qui viennent autour, le fait que nous ayons de nombreux partenariats institutionnels et privés, va permettre aux startups de mieux connaître l’environnement du sport, de mieux y être intégré. Typiquement nous avons un partenariat avec Sporsora, qui est l’association des acteurs de l’économie du sport qui permet aux startups du Tremplin d’être adhérentes gratuitement la première année. Cette adhésion va permettre aux startups de rentrer dans un écosystème auquel elles n’auraient pas eu forcément accès. Le fait d’être dans le Tremplin va également leur permettre d’avoir un certain label. Elles ont été sélectionnées parmi plus de 100 startups, donc être chez nous leur permet d’avoir une certaine crédibilité, une caution supplémentaire et ça leur permet d’avoir une visibilité médiatique plus importante.
- Quelles sont, au sein du Tremplin les startups les plus innovantes ?
Si on parle de rupture dans l’innovation on va parler plus naturellement de LSee et de Wisepack.
En effet, LSee est une analyse scientifique des bios marqueurs liés aux bruleurs de graisse, c’est quelque chose qui n’existait pas auparavant, c’est quelque chose de totalement nouveau, ce n’est pas seulement une innovation d’usage ni de service c’est une innovation scientifique.
Ensuite Wisepack avec l’innovation des bulles d’eau comestible et biodégradable où on est sur un produit qui n’existe pas et qui est complétement nouveau. En terme d’innovation pure on est sur des choses extrêmement différenciantes et extrêmement nouvelles.
- Et quelles sont les startups qui fonctionnent le mieux ?
Les startups aujourd’hui qui génèrent déjà des revenus et qui sont dans des phases plus matures que d’autres, notamment car elles existent depuis plus longtemps et parce que le modèle fonctionne bien sont :
- Macc Lloyd qui équipe déjà la moitié du top 14 et un tiers de la Ligue 1. On est ici sur une startup qui a réussi son intégration de manière forte sur le marché français.
- Gymlib qui a levé 1 million d’euros cet été et qui commence à générer de l’argent et avoir un réseau de partenaires très intéressant.
- Running Heroes qui en un an compte 200 000 utilisateurs et réussi à avoir un modèle économique très intéressant.
Pour le moment il n’y a pas eu de coup d’arrêt, toutes les startups du Tremplin sont plutôt en phase avec ce qu’on pouvait espérer de leur développement.
- Quels accompagnements proposez-vous aux 17 startups présentes au sein de l’incubateur ?
Nous essayons en matière de formation et de conférence de toucher un peu à tout, d’avoir des choses sur le marketing, sur la levée de fond, sur le crowdfunding, sur l’aide à l’innovation, sur le sport et le haut niveau ou encore sur l’utilisation de la vidéo. Nous essayons d’être varié dans nos propositions de valeurs et de susciter le fait que les startups travaillent ensemble sur un certain nombre de thématiques, il y a beaucoup de startups qui sont sur le net, et du coup dans la problématique centrale et le recrutement des utilisateurs. Par exemple nous avons organisé un petit déjeuner où les startups ont travaillé ensemble et se sont données les bonnes pratiques et les méthodes sur le recrutement des utilisateurs sur le web donc nous allons aussi essayer de travailler sur le travail commun entre les différentes startups.
- Quelle est la durée d’incubation pour les startups ?
Elles peuvent rester entre 1 an et 3 ans. Le contrat que l’on signe avec les startups est d’un an mais renouvelable 2 fois. Pour les startups qui sont rentrées plus vieilles c’est-à-dire qui sont dans une phase de décollage, donc une phase de maturité supérieure, elles resteront 2 ans maximum chez nous.
Concernant la prolongation du contrat, au bout d’un an les startups repassent en comité de sélection, il y a donc un regard à ce niveau, en général si tout c’est bien passé il n’y a pas de problème pour renouveler le contrat mais il faut savoir que l’incubation chez nous est payante. Donc si la startup ne fonctionne pas et que les choses ne sont pas positives d’elle même elle ne prendra pas le risque de renouveler une deuxième année d’incubation.
Concernant le prix de l’incubation, les startups en amorçage payent 1500€ par mois et en celles en décollage payent 7 000€ l’année. Face à ça, il y a une contrepartie, c’est que les startups qui viennent chez nous sont éligibles au fond Paris Innovation Amorçage et qui les aide avec des subventions ou des prêts à taux zéro. C’est un fond qui est financé à 50% par la mairie de Paris et à 50% par la BPI orchestré par la mairie. Cependant, ce n’est pas automatique, une startup qui entre chez nous n’a pas automatiquement droit au PIA mais elle est éligible au PIA. Seules les startups qui sont des incubateurs labélisés ville de Paris seront éligibles.
- A partir de quand allez-vous lancer une nouvelle campagne de « recrutement » ?
L’objectif est de lancer un appel à candidatures chaque année, on va donc en lancer un avant la fin de l’année 2015 pour recruter la promotion qui rentrera à mi 2016 dans les murs du Tremplin qui seront dans les murs de Jean Bouin. Au niveau du recrutement je pense qu’on sera entre 10 et 15 startups pour la nouvelle promotion.
- Quels sont les partenaires du Tremplin ? Les startups ont-elles des avantages avec ces partenaires ?
Nous avons des partenaires membres fondateurs qui sont la FDJ, Nike, UCPA, Accor Hôtel Aréna, les magasins Lepape, un assureur qui va bientôt rejoindre le Tremplin et l’INSEP. Ces membres fondateurs sauf l’INSEP sont tous des membres qui payent pour être au Tremplin, car ils sont membres du comité de pilotage, donc ils sont parties prenantes des décisions sur l’évolution du Tremplin, ils sont également membres du comité de sélection donc ils sont aussi décisionnaires sur les startups qui sont sélectionnées. Ils peuvent profiter de leur partenariat avec le Tremplin pour animer et susciter l’innovation en interne dans les groupes et selon les partenaires il y a des activations qui sont différentes, par exemple, l’INSEP a donné accès à beaucoup de ses réseaux à un certain nombre de startups.
Au niveau des partenaires institutionnels, nous avons Sporsora, la FIFAS, la FFSE, Sporaltec et la LFP. Avec eux nous travaillons sur des échanges pour essayer de mettre en avant et favoriser le développement des startups pour leur permettre de présenter leur projet devant un certain nombre de personnes. Par exemple, en partenariat avec la LFP, nous avons permis à des startups de s’exprimer devant 12 stadium managers réunis à la commission de la LFP qui travaillaient sur des problématiques de billetterie. Pour les startups ça leur permet de gagner du temps en développement commercial et de se présenter à plus de monde en même temps.
- Pouvez-vous nous exposer le projet à moyen terme et long terme du tremplin ?
Ce qui est intéressant dans le projet c’est qu’il n’y a pas trop de limites. Aujourd’hui nous avons vocation à devenir un acteur de référence autour de l’innovation sportive. De plus, il y a un attrait international certain pour le Tremplin. Il y a eu des contacts avec des Néerlandais, des Italiens, des Espagnols, des Canadiens sur le sujet. Il y a également des Brésiliens qui sont venus en Europe pour visiter un certain nombre d’acteurs de l’économie du sport et ils sont passés en France pour visiter le Tremplin ou encore le président du comité olympique Néo-Zélandais. Il y a également eu des articles sur le Tremplin sur SportTechie qui est un acteur référant à l’international. L’objectif sera donc de travailler à l’internationalisation du Tremplin et d’en faire un acteur qui a du potentiel au niveau international.
- Pour finir, comme à notre habitude, quel est le rendez-vous sportif qui vous a le plus marqué ?
L’événement sportif qui m’a le plus marqué c’est les Jeux Olympiques de Londres car je n’y avais jamais été. J’ai découvert les Jeux Olympique dans des conditions exceptionnelles car j’ai assisté à la fois à la cérémonie d’ouverture et à la plupart des finales.
Je citerais plus particulièrement les épreuves de natation car c’est quelque chose qu’on ne va pas forcément voir naturellement, ce n’est pas très connu mais il y un aspect très regroupé. Puis si je devais encore préciser je préciserais sur la médaille d’or du 4 fois 100 mètres français qui a été un moment extraordinaire de par la course en tant que telle et son scénario, de par la revanche qu’elle représente de 2008 de ce même relais français, et également de par le fait qu’on voyait la France du 4x100m devant les Etats-Unis et la Russie c’était extraordinaire de voir la France sur la plus haute marche avec deux monstres à ses côtés.
Un grand merci à Benjamin Carlier pour sa disponibilité et son partage d’expérience !